Théâtre et pâtisserie à Bucarest
De 35 à 40 °C pendant trois semaines, ça, c’était prévisible et prévu. La météo ne s’est pas trompée.
Première semaine : on fait de la pâtisserie, pains divers, brioches, pains au chocolat… Dans la cantine, un bungalow en plein soleil, c’est plutôt 40 à 45 °C, surtout quand le four est en marche. Il faut adapter les recettes, même avec un « unt » irlandais ! Les levures sont déchaînées ! Le levain de seigle, qu’il faut normalement trois jours pour préparer, déborde de son bol en une demi-journée.
Le terrain que Maria a acheté au nord de Bucarest a été planté de légumes divers. Il est très productif ! Chaque jour plusieurs dizaines de kilos de tomates, d’aubergines et de haricots sont récoltés et rapportés à la maison où ils nourrissent les enfants. Un puits a été foré à 55 m et produit une eau de très bonne qualité, confirmée par des analyses. On en rapporte dans des bidons pour abreuver toute la maisonnée.
Une dame de 78 ans, ancienne agricultrice, travaille bénévolement pour ces récoltes, ainsi qu’à la maison pour les cuisiner. Tous les enfants l’appellent Bunica (grand-mère en roumain). C’est un personnage à la Casa Jimbolia !
Les quatre scouts de Nantes, Flore, Clarisse, Marine et Pierre, nous rejoignent le 5 juillet et prennent très vite chaleureusement contact avec les enfants. Dans une des salles de classe du lycée, Martine commence la lecture en commun de la pièce de Shakespeare « Le songe d’une nuit d’été », propose la distribution, non sans passion autour du rôle de Puck, et commence les répétitions.
Deux grands draps verts sont accrochés sur un mur du lycée. Titouan sort ses feutres, ses peintures, ses pinceaux et ses bombes et commence à dessiner une grande fresque qui sera la toile de fond de scène.
Ce qui était moins prévisible que la météo, c’est un contrôle inopiné des services sanitaires et sociaux entraînant la fermeture administrative de la Casa Familie. Les 18 enfants sauvés de la rue par Sœur Maria se retrouvent à la rue pour plusieurs jours, ainsi que Bunica et Sœur Maria elle-même. 30 ans après Ceaușescu, la violence du système n’a pas beaucoup faibli et nos Cavaleri sont plus que jamais Rătăcitori.
Improvisation !
Une solution provisoire est trouvée pour une partie des enfants qui peuvent être hébergés à Biertan, mais seulement pour le week-end. Les autres vont dormir, qui chez des proches, qui dans les appartements des grands, qui dans la salle de répétition au milieu des costumes de Pierrette !
Les téléphones chauffent sous la canicule et Maria obtient l’accord des moines d’un monastère près de Pitești pour nous recevoir. Nous voici partis pour Argeșelu, à 130 km au nord-ouest de Bucarest. Plus précisément, il s’agit d’un monastère des Oblats de Marie Immaculée, un ordre d’origine française fondé par Saint Eugène de Mazenod, évêque de Marseille de 1837 à 1861.
Grâce aux voitures de parents, voiture de location et microbus du lycée nous nous retrouvons à 27 dans une très grande maison, très confortable, mais surtout, nous recevons un accueil de rêve de la part des deux prêtres qui tiennent le lieu. Ici tout est simplicité, quiétude, gentillesse. Une immense et magnifique pelouse plantée de grands arbres va être notre salle de répétition en plein air, dans une relative fraîcheur. Ce sera aussi un superbe terrain de jeu pour les activités proposées par les scouts. Nous déjeunons et dînons à l’extérieur, sous un grand velum qui nous protège du soleil.
Le matin l’un des prêtres dit la messe, le soir il fait la cuisine et après le dîner, enfile sa tenue de footballeur pour un match sur le terrain multi-sports.
Damian, prêtre, pizzaiolo et footballeur
Au cours de cette semaine, Otilia nous propose, comme l’année dernière, une demi-journée de formation avec ses collègues gendarmes de la région. Une présentation ludique des métiers de la gendarmerie et de la police, avec une sensibilisation aux risques de la société d’aujourd’hui : délinquance, internet, alcool, stupéfiants… dans un cadre verdoyant.
Mais il ne nous reste qu’une semaine et, compte tenu de ces événements, nous décidons de renoncer à présenter un spectacle car, vivant au jour le jour les péripéties de la fermeture et des travaux de la maison, nous n’avons pu répéter que la moitié de la pièce.
Nous proposons à Sœur Maria et aux enfants de revenir pour une petite semaine à la Toussaint afin de finaliser les répétitions et donner le spectacle à Bucarest.
Entretemps, nous comptons sur nos acteurs Cristi et Ioana ainsi que sur Bogdan, un ancien de la Casa Familie, devenu professeur de théâtre au lycée Timotei Cipariu, pour faire répéter les enfants afin qu’il ne reste que le travail de mise en place final à effectuer en octobre. Titouan terminera le rideau de fond de scène pendant ses vacances d’été.
Les difficultés rencontrées devraient nous permettre de rebondir en offrant aux enfants la possibilité de se prendre en charge en autonomie avec Bogdan et d’exister en tant que troupe de théâtre, même en notre absence, ce qui est notre souhait depuis toujours.
Travaux rue Jimbolia
À la demande des services sociaux, des travaux sont effectués à la Casa Familie et dans les appartements . André fait quelques réparations d’électricité. Le personnel du lycée se charge de repeindre certaines chambres.
À la fin de notre séjour au monastère, nous apprenons avec joie que l’autorisation de ré-ouvrir la maison a été obtenue. Cependant, le deuxième étage, où se trouve la chapelle et deux chambres, a été condamné et doit le rester. Sa ré-ouverture est conditionnée à l’installation d’un escalier extérieur qu’il va falloir financer.
Le coût de l’hébergement des enfants au monastère (1 300 €) a été supporté intégralement par l’ADÉFRO. En outre, une somme de 1 000 € a été versée à Sœur Maria comme participation aux frais entraînés par les travaux. Ces coûts n’étaient pas prévus dans notre projet initial.